Il n’y a guère de danse qui recèle autant de potentiel d’improvisation que le tango argentin. L’essentiel est que le leader montre où il veut aller tout en faisant preuve d’empathie envers son partenaire.
Quiconque souhaite apprendre à diriger ou s’interroge sur la signification du leadership ferait bien de prendre une séance d’essai de tango argentin. En effet, selon moi, aucune autre danse n’explique aussi bien le « leadership ». C’est ce que je constate à chaque fois que je me glisse dans mes chaussures de tango pour conquérir le parquet avec mon partenaire.
Qu’est-ce qui explique cela ? En premier lieu, parce que chaque partenaire doit sentir ce que l’autre veut. En résumé, il s’agit d’écouter et de faire preuve d’empathie. Si je devais choisir un autre mot, je dirais « ressentir» à la place d’« écouter ». Le tango argentin est une danse extrêmement créative et communicative, pleine d’improvisations, de pas et de mouvements qui naissent de l’action commune. Comme dans la vraie vie, les danseurs doivent réagir, développer des idées et trouver des solutions lorsque des imprévus surviennent.
Dans le tango argentin, on peut – avec un répertoire de pas et de mouvements relativement restreint – découvrir sans cesse de nouvelles figures et des chemins communs. Dans le jargon des affaires, on appellerait cela une « Toolbox », une sorte de boîte à outils qui permet de réagir avec souplesse aux situations. La condition préalable est la suivante : personne ne se précipite, mais on s’écoute et, dans le meilleur des cas, on devine déjà le prochain pas que l’autre va faire.
Outre le fait de « ressentir», il est essentiel de clarifier les rôles. Si l’on décide de diriger, il faut savoir où l’on va. Il faut adopter une attitude que l’autre comprend, ou mieux encore, qu’il peut ressentir. Quiconque souhaite diriger — que ce soit dans une entreprise ou sur le parquet — doit rester fidèle à lui-même et développer une attitude intérieure qui indique la direction à suivre. Ce n’est qu’ainsi que l’autre sait quel est le prochain pas qui a du sens, quelle est la prochaine figure à exécuter. C’est le seul moyen d’instaurer la confiance. C’est un dialogue dans lequel on sent ce que l’autre veut, tout en restant soi-même à chaque instant.
Selon moi, un bon danseur de tango est l’exemple même du leader idéal. De bons dirigeants ne persuadent pas leurs employés de faire quoi que ce soit sans tenir compte de leur opinion. En effet, les œillères sont le meilleur moyen de perdre ceux qui sont censés vous suivre. Celui qui danse bien est en accord avec lui-même et envoie pourtant des signaux parfaitement compréhensibles. Si cette danse est pratiquée avec passion, on peut être à peu près sûr que le partenaire aura confiance et suivra.
* Chères lectrices, chers lecteurs ! Dans les textes de mon blog, j’utilise alternativement la forme féminine et masculine. J’ai fait ce choix afin de ne pas perturber le flux de lecture par des *femmes ou des variations similaires du genre.